Comité permanent de la science et de la recherche (SRSR)
Programmes des bourses d’études supérieures et postdoctorales du gouvernement du Canada
That, pursuant to Standing Order 108(3)(i), the Committee undertake a study of the Government of Canada’s graduate scholarship and post-doctoral fellowship programs, in particular the freezing of funding amounts, the funding system and the impact on graduate students and post-doctoral fellows, and that it hold a minimum of six meetings on this study and report its findings to the House.
Remarques présentées par M. Philippe-Edwin Bélanger
Président, l’Association canadienne pour les études supérieures
4 mai 2023
Colline du Parlement
Ottawa
Introduction
Je m’appelle Philippe-Edwin Bélanger et je suis directeur du Service des études supérieures et de la réussite étudiante à l’Institut national de la recherche scientifique. L’INRS est un établissement universitaire dédié exclusivement à la cherche et à la formation aux cycles supérieurs. Il est un des dix établissements constituant le Réseau de l’Université du Québec. Je m’adresse à ce comité aujourd’hui en ma qualité de président de l’Association canadienne pour les études supérieures.
L’ACES est l’association nationale du Canada promouvant l’excellence dans l’enseignement de cycles supérieurs et la recherche. Nos membres comptent plus de 60 universités et instituts universitaires de recherche canadiens, ainsi que plusieurs intervenants intéressés par l’enseignement de cycles supérieurs. La vision de l’ACES consiste à soutenir le développement des individus par l’érudition, la recherche, l’innovation et le partage des bonnes pratiques, afin de contribuer à l’épanouissement des sociétés au Canada et dans le monde.
L’ACES reconnaît que les investissements importants du gouvernement fédéral dans l’écosystème universitaire de recherche, présents et passés, ont contribué de manière significative au développement d’une culture de la recherche au Canada. Toutefois, l’ACES continue de demander que les trois conseils subventionnaires obtiennent de l’État fédéral les moyens d’augmenter la valeur des bourses d’excellence et des subventions de recherche. Les membres de l’ACES s’attendaient à une augmentation substantielle des bourses d’études supérieures et postdoctorales et du financement de la recherche. Le conseil d’administration de l’Association est donc extrêmement déçu par le budget fédéral de 2023 et par le manque d’investissement dans l’écosystème de la recherche universitaire au Canada.
Les défis auxquels sont confrontés les chercheurs sont sérieux et immédiats
Malgré les nombreux appels à l’action lancés par les chercheurs et les coalitions étudiantes au cours des dernières années, et à l’encontre des recommandations de son propre comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche, le gouvernement du Canada a décidé d’ignorer dans son budget 2023 les étudiantes et les étudiants canadiens diplômés, les stagiaires postdoctoraux et la communauté de l’enseignement supérieur de manière plus générale. Ce sous-investissement dans les générations actuelles et futures de chercheuses et chercheurs entravera sans aucun doute la capacité du Canada à relever avec succès les défis futurs tels que les changements climatiques ou le déploiement de l’intelligence artificielle. De plus, l’avantage concurrentiel du pays en faveur de l’attraction des meilleurs chercheurs du monde dans nos universités s’en trouve amoindri. Plus grave encore, ce manque de financement persistant ne fera qu’exacerber les difficultés financières rencontrées par les étudiants des cycles supérieurs et les post-doctorants dans tout le pays, avec des coûts de location élevés, des pressions inflationnistes et autant de facteurs qui contribuent à augmenter la précarité financière des étudiantes et des étudiants. Je ne saurais trop insister sur le fait que les défis auxquels font face les personnes étudiantes des cycles supérieurs et les postdoctorants au Canada sont graves et immédiats. Il est donc urgent d’agir.
Le financement accordé par le gouvernement fédéral aux étudiants des cycles supérieurs et aux postdoctorants stagne depuis près de vingt ans. Depuis 2003, année de la création du Programme de bourses d’études supérieures du Canada, il n’y a eu aucune augmentation de la valeur des bourses de maîtrise (BESC-M) ou de doctorat (BES-D), et aucune augmentation de la valeur des bourses postdoctorales depuis 2015. Pourtant, comme nous le savons tous très bien, beaucoup de choses ont changé en deux décennies. Selon le calculateur d’inflation de la Banque du Canada, une bourse de maîtrise de 17 500 $ accordée en 2003 équivaudrait à 26 000 $ aujourd’hui, tandis qu’une bourse de doctorat de 21 000 $ accordée en 2003 aurait une valeur de 31 000 $.
En raison de l’inflation, de l’augmentation des frais de scolarité et du coût de la vie, la valeur actuelle des bourses BESC-M, des BES-D et des bourses postdoctorales est égale ou inférieure au seuil de pauvreté national fixé par le gouvernement fédéral. Nous maintenons donc, actuellement, environ 3 000 jeunes chercheuses et chercheurs les plus talentueux et les plus novateurs du Canada sous le seuil de la pauvreté.
L’ACES reconnaît et salue que le gouvernement ait mis en place des mesures de financement supplémentaires depuis 2003, notamment : l’augmentation du nombre de BESC en 2015 ; la prestation d’urgence du Canada pour les étudiants (PCEE) et le Fonds d’urgence pour la continuité de la recherche au Canada (FUCRC) établis en 2020 ; et, plus récemment, les bourses d’études et de recherche ciblées pour les étudiants-chercheurs de race noire décrites dans le budget de 2022. Ces efforts sont certes louables, mais ils ne règlent pas le problème central : la diminution de la valeur des BESC-M, des BES-D et des bourses BP.
L’insécurité financière des chercheurs a des conséquences importantes pour la société canadienne
Selon L’ACES, l’insécurité financière des étudiants de cycles supérieurs et des postdoctorants a des conséquences importantes pour la société canadienne.
Une étude approfondie menée en 2016 à l’Université de Montréal a révélé que l’insécurité financière contribuait à des taux alarmants de problèmes de santé mentale chez les étudiants universitaires, notamment des taux élevés de maladie mentale, de dépendances à l’alcool et aux drogues, de maladies chroniques et de suicides. D’autres recherches démontrent que ces problèmes de santé mentale et physique sont vécus de manière plus aiguë par les femmes, les personnes noires, les autochtones et les personnes racisées , ainsi que par les étudiants de première génération et les étudiants étrangers. En effet, l’accès à un financement adéquat reste l’un des obstacles les plus difficiles à surmonter pour atteindre les objectifs d’équité, de diversité et d’inclusion dans l’enseignement supérieur.
Depuis de nombreuses années, des appels sont lancés en faveur de l’augmentation du nombre et de la valeur des bourses pour les étudiants des cycles supérieurs et les postdoctorants. L’ACES a soutenu cette position dans son mémoire de consultation prébudgétaire en 2017, et de nouveau en 2022. Au printemps 2021, une coalition de 7 100 scientifiques de tout le Canada a signé une lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau et au ministre François-Philippe Champagne pour demander une augmentation des bourses et subventions du CRSNG, dans laquelle ils affirmaient que « l’inaction du gouvernement pour soutenir les leaders scientifiques de demain perpétue les barrières systémiques » dans l’enseignement supérieur. Ces appels à l’action ont depuis été repris dans des déclarations publiques publiées par l’ACES, Universités Canada, l’U15, la Fédération des sciences humaines et sociales et l’ACFAS. Il est important de noter que les étudiants ont également commencé à manifester, notamment lors de la grande marche nationale organisée au début du mois par le mouvement étudiant populaire Soutenez notre science.
Pour résoudre les problèmes critiques liés au financement de la recherche au Canada, l’ACES recommande les solutions suivantes :
-
- Une augmentation significative du nombre de bourses accordées aux étudiants des cycles supérieurs et aux postdoctorants par les 3 conseils;
- Une augmentation significative de la valeur des bourses d’excellence en recherche;
- Une augmentation significative du nombre et de la valeur des subventions de recherche pour permettre aux professeurs d’augmenter le soutien financier offert aux étudiants.
Conclusion
L’ACES est convaincue de l’importance des études supérieures pour mieux comprendre et résoudre les problèmes complexes auxquels sont confrontés tous les Canadiens. Pouvoir s’appuyer sur des chercheuses et des chercheurs et une relève scientifique de haut niveau constitue un objectif particulièrement important pour assurer un développement juste, équitable et durable de notre pays. Pour atteindre cet objectif, il est essentiel que les étudiantes et les étudiants des cycles supérieurs, les stagiaires postdoctoraux – les leaders scientifiques de demain – soient soutenus de manière décente.
J’aimerais terminer cette présentation par une citation du ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, l’honorable François-Philippe Champagne, qui a fait ces remarques en octobre 2022 en réponse à la pétition E-4098 déposée à la Chambre des communes au sujet du financement de l’enseignement postsecondaire : » Le gouvernement du Canada […] reconnaît l’importance d’investir dans la recherche postsecondaire et le rôle essentiel que jouent les bourses fédérales dans l’épanouissement et le maintien des meilleurs talents du Canada en les aidant à progresser dans leur carrière et à accroître leur sécurité et leur indépendance financières. «
Je veux dire au ministre aujourd’hui que nous sommes d’accord avec lui. Mais maintenant, il est temps d’agir !
Je vous remercie pour le temps que vous m’avez accordé et je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.